Ces dernières années, il n'est pas
rare de voir défiler des concerts aux affiches assez fat dans le
Nord ou en Belgique. Pour ma part, tout à commencé avec Lille en
Avril 2008. Je découvre La Rumeur, un bar/concert dans les environs
de Lille Sud, sa cave, son bar, son public. Le coup de foudre me
clou sur place et, d'ores et déjà, je sais que je vais côtoyer ces
lieux où l'Underground peut s'exprimer sans contraintes. Depuis ce
temps, ce ne sont pas moins de 140 concerts - allant des festivals
grand format (Le Party San), plus ciblés (le Throne Fest par
exemple), des concerts dans des bars-concert Lillois, Valenciennois
ou Douaisiens ou encore dans des salles de taille moyenne où se
côtoient Death Old-School, Black Metal, Sludge/Doom etc - auxquels
j'ai pu assisté. Cela fait presque un an que l'idée me trottait
dans la tête, celle de faire du Live Report avec passion, sans
langue de bois (ou de pute selon les envies), sans passer par un
quelconque magazine (Metalchiasse à tout hasard? Là où t'as 5 lignes par groupe) ou site/webzine officiel (bien que je soutienne
totalement Horns Up)... Bref, juste avec mes tripes. Et c'est donc
avec cette date de Black Metal Dépressif ayant eu lieu le 30 Mars
2016 à El Diablo que je m'y atèle.
En théorie, le public Nordiste ne se
bouge pas le fion lorsqu'un concert a lieu en pleine semaine. Alors
est-ce parce qu'il n'y avait que 4 jours cette semaine-là que je me
retrouve face une date quasi sold out ce soir-là? J'en ai foutre
aucune idée, mais en tout cas, ça me fait plaisir et en même temps
j'appréhende énormément le truc. Car si El Diablo - découvert
pour ma part il y a un peu plus d'un an avec les locaux Skelethal –
est une petite salle comme je les aime, il faut tout de même
admettre qu'elle ne permet pas d'accueillir plus de cent personnes
sans risquer l'asphyxie de vapeurs éthyliques et de sudations
(quoiqu'en général, les deux ne font qu'un). Et mon angoisse n'est
pas pour diminuer lorsque je constate qu'une vingtaine de personnes
n'ayant pas réservé attendent dehors. Heureusement pour moi, j'ai
été prévoyant pour le coup, ne voulant franchement pas louper
cette date. Direction le sous-sol donc, histoire de se faire poser le
rituel tampon et d'aller chercher une pinte de bibine belge.
Finalement, me voilà rassuré : la salle me paraît tout de même
plus spacieuse que dans mes souvenirs et ce, malgré le pilier
central, un classique de ce genre de salles (un peu comme à La
Rumeur en fait). Et tout au long de la soirée, j'ai même pu me
faufiler au devant de la scène afin d'apprécier au mieux les
groupes.
A peine le temps de m'approcher
qu'Antilife début les hostilités. Bien que je sois principalement
venu pour Psychonaut 4, découvert l'année dernière, j'attendais
beaucoup de ce nouveau projet aux élucubrations anti-humanistes du
chanteur d'Hats Barn. ET PUTAIN QUELLE CLAQUE! A peine posé devant
la scène que le groupe commence à jouer, Psycho arrivant au micro
vêtu d'un sweat blanc aspergé de sang (et connaissant le gaillard,
pas de trompe-l'oeil ici) dont la capuche descend jusque sur le nez.
D'ailleurs, rares seront les moments où l'ont pourra apercevoir son
visage durant le concert. Je n'avais entendu qu'une chanson qu'ils
avaient postée sur Youtube, mais là, je ne m'étais vraiment pas
imaginé assister à un concert aussi violent, retournant et haineux.
Disons-le tout de suite : le Black Dépressif "classique"
m'a toujours emmerdé. J'ai beaucoup de mal à apprécier ceux qui se
contentent de faire du mid-tempo sur fond de chuchotements rocailleux
ressemblant à des coqs asthmatiques où les seules paroles
ressemblent à un poème d'ado gothique boutonneux fan de Baudelaire
et en mal de reconnaissance. Pour te donner une idée, Silencer,
Lifelover, Totalselfhatred, Shining : voici les groupes qui me
bottent dans le style. Et pour cause : on est loin d'un éternel
cover d'un groupe qui parodie le Black Dépressif. Après, il
subsiste quelques exceptions qui me parlent, comme Gris (même si,
avec leur dernier album, les mecs tirent plus sur l'ambiant et
l'atmosphérique), Happy Days ou Wedard.
Bref, il me semblait important de me
situer un peu dans ce paysage suicidaire.
Revenons-en à Antilife. Voici
exactement le genre de truc qui me parle! Jamais je n'ai assisté à
autant de violence au sein d'une scène qui se suicide à petit feu.
Les riffs et la guitare "lead" assénés avec violence et
rage te transperce comme la lance d'un Spartiate, la batterie qui
sait aussi bien alterner mid-tempo et laisse une sacré place au
Blast qui te retourne le cerveau, à tel point que tu as l'impression
de sombrer dans la folie meurtrière d'un cerveau sociopathe. Et
surtout : le charisme incroyable du chanteur. Putain, mais c'est
exactement ce pourquoi j'avais autant aimé Hats Barn lorsque je les
avait vu pour la première fois à Tournai en Décembre 2008. La
vieille époque, celle où juste Total Genocide Devastation était
sorti et où les cris suraigus de Psycho enterraient n'importe quel
groupe de Black digne de ce nom. Merde putain mais c'est totalement
inhumain de hurler comme ça, j'en suis encore sur le cul. Des lames
de rasoir sifflant sur ta chair écorchée, véritable haine dans la
dépression, le dégoût de l'être humain poussé à son paroxysme.
Et puis j'en reviens au charisme, mais jamais je n'ai vu autant de
haine dans le comportement d'un mec sur scène : tremblements
psychopathes, lacérations de chair à grands coups de lames de
rasoir, maltraitance du micro/pied-de-micro, sifflage de Honey Jack
Daniel's sans repos et un flingue pour accessoire, dirigé vers le
public, et lui-même. Et vu le mec, c'est un vrai de toute manière.
En bonus, on aura le droit à une
reprise de Silencer (Death – Pierce me), chose qui fait ô combien
plaisir! Petit bémol pour ma part pour l'intro, jouée sur des
guitares saturées. Je me doute que l'envie était de rendre le truc
plus malsain et dégueulasse, mais ça n'a pas pris chez moi. Enfin,
vraiment un détail insignifiant car la cover a été interprétée
avec brio, la "hainisant" même un peu plus.
En somme, une première partie comme
jamais je n'en avait vu auparavant qui a totalement compris qu'il
suffit pas de gueuler "Kill Yourself" pour se la jouer
dépressif, que la haine de l'humain était indissociable du dégoût
du monde et, par conséquent de la vie de merde qui t'entoure. Bref,
ça laisse présager énormément de bonnes choses pour leur avenir,
car ils ont un potentiel scénique incroyable.
Le temps de remonter se fumer une ou
deux clopes, se reprendre une bibine, discuter avec les potes et
c'est au tour de Psychonaut 4 de se lancer dans la conquête Lilloise
à grand coups de mélodies joyeuses et dépressives. Car oui, ce qui
m'avait autant foutu sur le cul avec ce groupe, c'est son côté
musical à la Lifelover : de la joie et de la mélancolie, un peu
comme si les mecs se complaisaient dans la dépression sur fond de
drogues et d'alcool. Putain, en voilà encore un de truc qui me
parle! Et ce ne sont pas moins que 3 guitaristes qui permettent de
soutenir les rythmes effrénés et le chant carrément hurlé de Graf
von Baphomet qui, pour l'occasion, s'est aspergé de sang (la
bouteille traînant encore dans les chiottes et, vu l'odeur, c'était
pas du colorant ici non plus). Sans préambule, c'est Parasite,
première chanson (mis à part l'intro) de leur premier opus qui
entame les hostilités. Et, chose inattendue, l'avant du public est
carrément contaminé par des mecs qui se défoulent comme si Satan
était au centre de la salle. En théorie, ça me fait chier quand
des mecs foutent le bordel durant un concert de ce style mais cette
fois-ci, j'avais fortement envie d'un défouloir moi aussi. D'autant
plus que, tout comme Antilife juste avant et dans un autre registre,
leur black est rempli de haine et d'une volonté d'en découdre qui
surpasse tous ces pseudo-blackeux de la gaypride dépressive. Tout au
long du concert, la voix du chanteur ne faiblira jamais et, même si
je la trouve quand même moins hurlée que sur album, la répercussion
live de leurs chansons est quand même synonyme d'érection viscérale
pour moi. Comme tout fan exigeant, il est vrai que j'aurai aimé
entendre des titres comme Pseudo, My despair can't be explain ou Have a nice trip mais c'est sans conteste un réconfort monstrueux que
de prendre mon pied sur Serial Lier, Antihuman, Suicide is Legal ou
même la schizophrénique Moldy. Mais le summum est atteint lors de
deux covers que le groupe nous aura offert ce soir-là. Déjà, I
Wanna Be Your Dog d'Iggy Pop (Les Stooges mais c'est du pareil au
même), jouée avec virulence et énergie – chose qui peut paraître
en désaccord total pour un groupe de Black Dépressif, mais comme je
l'ai déjà dit à maintes reprises, ce soir, les mecs ont comprit que
le dégoût de l'humanité et la dépression (je préfère même le
terme de fatalité ou mélancolie) étaient indissociables de la
haine viscérale. Je crois même que la motivation des potes
éthylisés qui se défoulaient devant la scène a atteint son
paroxysme. Mais encore mieux : l'éternelle reprise de Nackstott de
Lifelover interprétée avec brio! Et une surprise (quoique je
commençais à y penser quelques heures avant le concert), non des
moindres : Kim Carlsson invité sur scène afin de poser ses lignes
de chants si particulières et monstrueuses dessus. Pour les ignares
: Kim est le chanteur du défunt Lifelover et joue également dans
Hypothermia, la tête d'affiche de cette soirée. Il était donc
logique qu'un groupe comme Psychonaut 4, à l'esprit aussi dérangé
que l'âme même de Lifelover, proposent quelque chose d'aussi
énorme. Et Kim restât même sur scène afin de participer à la psychotique et joyeuse Wor(l)d of pain and hate!
Et puis, pour l'anecdote, les mecs,
mais qu'est-ce qu'ils ont picolé. Psycho d'Antilife leur file la
teille de whisky en plein milieu du concert et ils se l'enfilent
d'une traite. La haine aha!
Une énorme claque donc pour ce
deuxième groupe que j'attendais avec impatience!
Mine de rien, je me rends compte qu'il
y a bien longtemps que je n'avais pas autant apprécié un concert de
black metal. La raison en est simple : le fan de Black Metal de base
est un gros beauf coincé dans les années 90 ou alors (pour la plus
grosse partie malheureusement) un jeune branleur qui se la joue Evil
mais qui comprend toujours pas que Behemoth ne jouent plus de Black
depuis longtemps. Bref, en France, les 3/4 du public de cette scène
est quand même à gerber, mais heureusement, ce soir, j'ai pas
l'impression d'en avoir croisé beaucoup, et putain ça, ça me fait
plaisir!
Il est donc temps de se rafraîchir une
dernière fois et d'entretenir son cancer du poumon avant d'aller
voir ce que donne Hypothermia sur scène. Une attente entre les deux
groupes qui m'aura semblé un peu plus longue ici, mais cela m'aura
laissé le temps de pouvoir discuter un peu avec un des guitaristes
de Psychonaut 4 et même le chanteur. Encore quelque chose si typique
des petits concerts mais ô combien agréable : pouvoir approcher des
mecs finalement très simples, heureux de rencontrer leur public qui
se retrouve dans leur musique. Je suis pas spécialement du genre à
aimer prendre des photos à tout va ou parler systématiquement aux
groupes dès que j'en ai l'occasion, mais quand il y en a un dans
lequel je me retrouve particulièrement, c'est franchement une
expérience géniale.
Enfin, il est aux alentours de 22h15 et
Hypothermia monte sur scène, ses membres vêtus de grandes capes
blanches, comme à leur habitude. Ma relation avec ce groupe est
assez particulière. Si j'aime beaucoup le Post-rock et les chansons
à rallonge qui n'ont pour seul but que de foutre une ambiance qui te
transcende en dehors de l'espace et du temps, chez Hypothermia je n'y
arrive pas du tout! C'est pourtant pas faute d'avoir tenté le coup
plusieurs fois et, malheureusement, mon impression est définitivement
confirmée par ce concert. Disons que c'est pas mauvais en soi, mais
pas moyen de trouver une variation pendant les compos avoisinants les
10 minutes. Toujours le même riff qui tournoit pour te rendre
totalement dingue. Ça m'en a titillé une sans faire bouger l'autre
en fait. Du coup, je ne peux pas trop m'étendre sur le sujet ici,
ayant préféré discuter avec quelques potes et le mec de Maltkross,
toujours présent avec sa distro aux concerts Nordistes.
En définitive, pour une date "vendue"
comme dépressive, on aura eu le droit à des groupes qui ne peuvent
être plus éloigné de cette scène "dépressive" tout en
y étant rattachée : de la pure haine misanthropique et sociopathe,
de la joie et de la complaisance dans la dépression et du post-rock
très (trop même) ambiant au son blackisé.
Tiens tant que j'y pense, c'est aussi
un plaisir de voir un des mecs de Black Command faire le déplacement
de Hollande pour venir sur Lille, sachant qu'il va également voir
cette date à domicile le samedi suivant.
Au final, cela faisait bien longtemps
que je n'avais pas autant pris mon pied sur un petit concert - je ne
dirais pas local car, mis à part Antilife, les autres groupes
venaient de Géorgie et de Suède.
Merci à Ondes Noires qui, bien que
basé sur Paris, ont créés cette branche dans le Nord et nous
organisent des putain de dates!
Pour conclure, je ne peux que citer
Psychonaut 4 :
"We will never find the
cure...[...] Useless me and useless you..."
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